vendredi 15 février 2013

MES CONFERENCES CORPORATE


MON EXPERTISE

Je suis d’origine bretonne par mes parents.
Je tire mes premiers bords en voilier dès l’âge de 7 ans. Les 30 années suivantes de ma vie se passeront proches de la mer et de la compétition à la voile :
De 7 à 14 ans je navigue sur les dériveurs de l’époque (Vauriens et Cavale, le célèbre Optimist n’étant pas né…) et en solitaire sur le croiseur familial. Je passe ensuite mes vacances à courir sur des bateaux de chantier divers championnats du monde de course au large et entame même une préparation olympique. En 1974, militaire au Bataillon de Joinville, j’intègre le prestigieux équipage du Pen Duïck VI d’Eric Tabarly avec lequel je navigue pendant 3 ans.
En 1977, Tabarly me prête son bateau pour courir la seconde Whitbread, unique course autour du monde en équipage de l’époque. Le bateau rebaptisé Gauloises II se couvre de gloire en remportant 2 étapes sur 4 dont celle du Cap Horn.
En 1989, je décide d’arrêter la compétition à la voile pour me consacrer à l'alpinisme. Mon palmarès nautique est bien rempli :
  • Elu meilleur skipper de l’année en 1978.
  • Recordman de l’Atlantique en solitaire sur le trimaran Gauloises IV en 1982.
  • Vainqueur de la Transat en double 81 et de la Route du Rhum 82 (classe 4) avec ce même bateau.
  • Champion du Monde des multicoques océaniques avec le maxi-catamaran Roger et Gallet en 1986.
  • Vainqueur de la Transat en double Rouen-NewYork 86 (Route de la Liberté) .
  • Second de la Transat en double 89 Lorient-St Barth-Lorient  sur le maxi-trimaran Duel-Aigle.
  • Vainqueur de 15 Grands Prix de multicoques entre 1980 et 1989 avec Gauloises IV et Roger et Gallet.
Depuis, installé à Serre Chevalier (Hautes-Alpes), je cours les montagnes après avoir brigué régulièrement  les premières places des grands raids aventure  (4 Raids Blancs, 1 Raid Gauloises, 2 Elf Authentique Aventure…)

Le 23 mai 2003, à 8h30  du matin, je réussi à atteindre le « toit du monde » soit l’Everest à 8850 mètres d’altitude, malgré une météo épouvantable.


Sommet de l'Everest le 23 mai 2003 8h30



MES MOTS CLÉS DE LA PERFORMANCE:



J’utilise dans l’univers des courses au large, des raids et des grandes expéditions en montagne des «mots clés de la performance» que l’on retrouve à l’identique dans le monde de l’entreprise :

  • ESPRIT D’ÉQUIPE
  • STRATÉGIE
  • ANALYSE
  • ORGANISATION
  • ADAPTATION
  • PATIENCE
  • LUCIDITÉ
  • PERSEVERANCE
  • TRAVAIL
  • RESULTATS

Lors de mes interventions "corporate", je montre par des exemples vécus les correspondances implicites avec le monde de l'entreprise.



ESPRIT D'EQUIPE

Un partenaire avait nommé ainsi son projet pour la course autour du monde de1989. C’est dire l’importance de l'équipage dans ces compétitions longues et dures pendant lesquelles les hommes doivent aller au bout d'eux-mêmes pour l’emporter. La constitution de cette équipe est fondamentale. Elle varie bien entendu selon le type de course envisagé. Chaque skipper a sa méthode car ses choix influent sur le fonctionnement de son équipe en mer. 


Océan Indien sur Gauloises 2 en 1977

En 1977, dans la seconde édition de la course autour du monde, nous partions avec GAULOISES II pour une aventure que je prévoyais difficile : bateau léger, très bas sur l’eau et peu habitable (hauteur sous barrots** de 1m65), 4 étapes longues d’environ 40 jours chacune dans des mers inconnues, peu de moyens de communication, aucun moyen de localisation (la balise ARGOS n’existait pas), Mon premier critère a été de choisir 8 équipiers capables de cohabiter ensemble longtemps dans des conditions extrêmes : le noyau de mon équipage fut donc constitué de personnes avec lesquelles j’avais auparavant longtemps navigué. Je privilégiais ensuite la polyvalence. En gros, chacun devait pouvoir barrer le bateau et régler correctement les voiles. Ensuite, chacun se partageait à tour de rôle les tâches ingrates du bord (cuisine, vaisselle, rangement) et était spécialiste (et responsable) d’un secteur d’activité (voiles, accastillage, gréement, mécanique, navigation…) L’équipage se relayait sur le pont par bordées (équipes) de 4 pour des quarts de 4 heures. En tant que skipper, j’avais adopté un fonctionnement « hors quart » afin de garder ma lucidité pour toutes les décisions importantes et superviser aussi la vie de mon équipage. Je m’occupais de la navigation et de la tactique, participais à toutes les manœuvres sur le pont et relayais les barreurs dans les moments délicats.
Cette organisation inspirée de ce que j’avais connu avec TABARLY à bord de PENDUICK VI a porté ces fruits puisque nous avons remporté 2 des 4 étapes de la course.  Malgré les problèmes que nous avons rencontrés (1 gouvernail cassé, 2 chavirages, 1 cyclone) l’équipage a toujours trouvé les ressources pour s’entraider, se dépasser pour faire avancer le bateau au maximum et garder confiance dans l’avenir.


Savoir barrer dans n'importe quelle condition...

Le rôle du skipper dans l’entretien permanent de cet esprit d’équipe est prépondérant. Pour être respecté et suivi, il doit être exemplaire : être sur le pont dans les moments difficiles, participer aux tâches ingrates, passer des nuits sans dormir, etc…De même, sans être le meilleur partout, il convient de ne pas avoir de lacunes techniques:  si le bateau perd 1 nœud de vitesse et 5 degrés de cap lorsque le skipper barre, c’est assez ennuyeux… 
Nous avons repris ce système dans la constitution de notre équipe de raid. Nous sommes 4 polyvalents, capables de marcher longtemps sans beaucoup dormir ni manger, de grimper, de pratiquer le cheval, les sports d’eau vive, le roller, la voile, le VTT. Selon nos aptitudes, nous nous répartissons les tâches: navigation, technique, nourriture, soins. Chacun ensuite apporte sa propre spécialité : Gilles l’eau vive et le VTT, Daniel l’escalade, Carine le cheval et les sports de glisse, et moi la navigation…Contrairement aux équipages de bateau les décisions peuvent se prendre en commun parce que nous ne sommes que quatre. Mais de toutes les façons, en dernier lieu c’est toujours le Capitaine qui tranche…


STRATEGIE


La compétition ne doit rien laisser au hasard. Dans les courses à la voile, comme dans les raids, il faut essayer de reculer au maximum les limites de l’aléatoire : pour cela il faut bâtir une stratégie. Cette stratégie est fonction de la connaissance de la concurrence, de la connaissance de ses propres qualités et limites et des moyens techniques dont on dispose. Ainsi, on cherche à exploiter au mieux les prévisions météo et les faire correspondre à ce que l’on observe sur place, on essaie de limiter les risques de casse et les fatigues inutiles, on cherche à se positionner au mieux par rapport à ses concurrents, on essaie d’obtenir le maximum de renseignements sur l’état physique de ses adversaires, on adapte ses efforts en fonction de la route qui reste à parcourir et de la forme de son équipe. La mise en place de ce type de stratégie demande une organisation sans faille. 
C'est exactement la même problématique dans le business.

Importance de la navigation en rallye raid.

ANALYSE


Comme dans le monde des affaires, en voile ou en raid, il importe de bien connaître ses concurrents, leurs qualités et leurs faiblesses. Observation et analyse sont donc des facteurs importants de réussite. Très tôt avec GAULOISES, nous avions installé au sein de notre équipe une « veille technologique » qui nous permettait de connaître, dans le mesure du possible (car les secrets sont souvent bien gardés), les innovation techniques des bateaux concurrents (en matière de voiles, gréement, électronique, accastillage). Ainsi, pendant toutes mes courses de bateau je conservais avec moi des notes et des observations techniques sur mes principaux adversaires :  performances des bateaux selon les allures et la force du vent, qualités et défauts des skippers et des équipages….Ces notes étant le fruit d’observations précises en mer mais aussi à terre.

ORGANISATION

Cette organisation qui permet la victoire est le fruit d’une équipe soudée. La course en solitaire en est le meilleur exemple. Le vainqueur de la Route du Rhum se situe au sommet d’une pyramide d’individus tous performants dans leurs spécialités respectives : l’architecte et les ingénieurs qui ont conçu le bateau, le maître voilier qui a construit le « moteur », les équipiers préparateurs qui ont aidé à la mise au point, le préparateur physique et le diététicien, l’ingénieur météorologue, le tacticien… Le skipper en est le chef d’orchestre et en assure la coordination. C’est cette équipe entière qui doit être félicitée dans la victoire du bateau et de son skipper.

De même dans les grands raids une équipe n’est pas constituée uniquement par ceux qui courent. L’assistance est fondamentale. Nos bonnes performances aux Philippines et au Brésil dans l’Elf Authentique Aventure ont été favorisées par nos 3 coéquipiers toujours à l’heure aux points d’assistance, avec le bon matériel, la bonne nourriture et les soins appropriés.


L'équipe du trimaran RG45


ADAPTATION

S’adapter aux conditions de la mer et du vent, c’est comme pour l’entreprise s’adapter aux conditions du marché. La voile en compétition est un sport difficile, car pour aller vite sur l’eau, il faut sans cesse adapter son bateau aux conditions changeantes de mer (vagues plus ou moins grosses, orientées différemment par rapport à la marche du bateau), aux variations de force et direction des courants, d’intensité du vent, etc…En mer comme en raids, c’est aussi adapter son équipage ou son équipe aux conditions rencontrées : raccourcissement des quarts dans le mauvais temps, choix des moments de repos ou de sommeil selon les conditions rencontrées dans les raids. 
Notre réussite à l'Everest en 2003 a été due principalement à notre faculté d'adaptation aux conditions météorologiques exceptionnellement mauvaises ce printemps et à notre changement drastique de stratégie.

Retraite à l'Everest dans le mauvais temps

PATIENCE


C’est un principe de base dans la navigation à voile. Il faut savoir attendre le retour du vent dans les calmes ou les accalmies dans les tempêtes, car la météo est vite changeante en mer (comme en montagne) : en 1986, pendant la Transat en Double Rouen–New-York, nous avons fait « le gros dos » à la cape pendant 24 heures face à une énorme tempête dans l’Atlantique Nord avant de repartir pour l’emporter. En 2003, nous avons attendu pendant quinze longues journées dans la solitude carcérale des camps d'altitude un semblant d'accalmie, avant de tenter (et réussir) les 8852 mètres du Toit du Monde. 
Patience rime souvent avec Adaptation et Persévérance. C’est aussi un « mot-clé » de l’entreprise.

LUCIDITE

Ce n’est pas une expression de marin, mais il est toujours important de «garder les pieds sur terre». Autant il ne faut pas céder au découragement dans l’adversité, autant il ne faut pas pécher par excès d’euphorie dans les moments de réussite. Une régate transocéanique, un raid, une ascension sont des épreuves de longue durée soumises à de nombreux facteurs. Doubler un concurrent peut être simplement le fait d’un problème technique ou météorologique le concernant. C’est un manque de lucidité dangereux que de l’attribuer systématiquement à ses propres performances, d’où l’importance de l’analyse et de la réflexion. 
Un des problèmes de la haute altitude est cette perte de lucidité qui peut s'avérer mortelle. Sur l'arête sud est de l'Everest à 8600 mètres d'altitude dans le vent et la tempête, je me demande encore si ce n'est pas ce dangereux manque de lucidité qui m'a permis de continuer....


L'arête SE de l'Everest le 23 mai à 7h00

PERSEVERANCE


Une course n’est gagnée …ou perdue, qu’une fois la ligne d’arrivée franchie. Jusqu’au dernier moment des retournements de situation incroyables peuvent se réaliser : en 1985, dans la Route de la Découverte (Transat en équipage) le démâtage du catamaran ROYALE à 5 milles (10 km) de l’arrivée nous a permis de prendre une troisième place inespérée. Dans les raids également, tout peut arriver. Des conditions défavorables peuvent devenir favorables et réciproquement. Dans la première édition de l’Elf Authentique Aventure aux Philippines, nous sommes passés de la quatrième à la première place lorsqu’un mal mystérieux a frappé les 3 premières équipes… Il ne faut donc jamais se décourager.

Notre équipe de raid à Nouméa

TRAVAIL


Pour atteindre la performance, il faut beaucoup travailler. En effet, cela demande d’augmenter son niveau de compétence, non seulement dans sa spécialité mais aussi dans les autres. Le terme « besogneux » n’est pas très élégant mais proche de la réalité, car progresser demande du travail, quel que soit le niveau de ses aptitudes. A un haut niveau, le talent ne suffit pas. Le footballeur Zinédine ZIDANE  avait peut-être au départ moins de qualités que d’autres. S’il est devenu le meilleur footballeur du monde c’est parce qu’il n'avait de cesse de travailler et de retravailler son art…et de se remettre en question.

Zizou avec nous en 2006 au sommet de la Grande Motte

RESULTATS
  •  En 1978, après notre victoire à Rio, il nous a été plus difficile de reprendre nos tâches de préparation que quelques semaines auparavant à Auckland, car nos malheurs de la seconde étape nous avaient sur-motivés pour la suite de la compétition. Ainsi, pendant l’escale d’Auckland, l’équipage est resté soudé de l’arrivée jusqu’au départ, travaillant d’arrache pied au chantier pour remettre son bateau en état. 
  • A Rio, nous étions beaucoup plus dispersés, nous avions pris quelques jours de vacances, bref, nous étions moins “ morts de faim ”. Je me souviens d’une laborieuse mise en route tout au long des premiers jours de course. Heureusement, nous nous sommes bien repris ensuite et cela a rendu la victoire suivante plus étonnante encore. 

VICTOIRE

“Seule la victoire est jolie”. Cette phrase a été prononcée par Michel MALINOWSKI battu sur le fil par Mike BIRCH à l’arrivée de la Route du Rhum 1978. 
C’est vrai que gagner est un vrai bonheur. C’est l’accomplissement, l’aboutissement et la récompense de toute une équipe.
 Mais, prudence, car elle possède son ambiguïté.
En effet, la Victoire ne doit pas effacer tous les problèmes rencontrés techniques ou humains, gommer toutes les souffrances endurées. Ainsi, l’état d’euphorie engendré par la victoire (ou la réussite de l’entreprise) ne doit pas faire perdre lucidité et sens de l’analyse. 

Ainsi, la Victoire doit être gérée correctement pour devenir un vrai succès.